Architectures de rêves

Libre parmi les libres, Sylvain Corentin s’est débarrassé de toute culture classique et respire à vif l’air sain de ses propres découvertes. Ses débuts s’effectuaient à la tronçonneuse, à la manière âpre et rustique d’un Marcus Lüpertz, ce qui sidère à l’approche de ses actuelles douces créations, féériques et enciellées. Un rien les transporte à l’envi. Elles s’aventurent dans un no man’s land inconnu marqué cependant, peut-être, d’une vague sacralité, d’une subtile présence magico-médiévale, et de lointaines influences d’art brut, voire d’art tribal. Son langage d’art, aux mains sans cesse agissantes, est direct et quasi immédiat. Art de sauvagerie douce et apprivoisée. Il crée et fait dans l’instant. Sculpture en apesanteur. Sculpture-action, quand chez lui, équilibre et déséquilibre s’étreignent sans fin. Subtil graphisme spatial.

Sylvain Corentin fait remède heureux à toutes les fabrications contemporaines. Il dé-crée en improvisant dans l’instant contre toute consommation efficace et répétitive, mécanique et rentable. Son art ne sert à rien, sinon à rêver d’un univers enfin prodigieusement habitable. Il crée du hors-sens inventif et ludique dans un esprit d’émerveillement constant d’éternelle inguérissable enfance. Des traces d’humour fluide et aéré incantent son territoire intime.

Sylvain Corentin dessine à bois nus dans l’espace ouvert de ses rêves, et la trop sensuelle couleur lui est inutile. Il écrit sa partition avec de simples et fins morceaux de bois qui font dessin innombrable dans l’espace. La branche, plus encore que l’os humain, a longuement et bien vécu.

La nature est son amie d’éternité. La légèreté est son territoire d’art, et l’improvisation sa respiration. On voit à travers ses architectures verticales et mystiques, joyeuses et fragiles, audacieuses et impensables. Elles font apparitions. Autant de surprises absolues. Autant de nids d’âme de trésor mental.

Écologie active, généreuse et poétique, es-tu là ?

« La branche d’art crée le chemin, et je travaille pour la planète » m’a dit lentement Sylvain Corentin.

Christian Noorbergen